Entre frères on se rend des services ( PV David)

Le quartier ouest du district 1 a des airs de bidonvilles. Du moins, ce qu'on aurait appelé un bidonville du temps d'avant l'infection. Maintenant c'était devenu le quotidien. Pas de système d'évacuation des eaux et des déchets efficaces, les rues étaient dégueulasses. Heureusement qu'on était dans un milieu assez sec sinon la rue serait constamment couverte d'une bouillasse dégueulasse et fort heureusement que le recyclage était devenu une nécessité vitale. Les bâtiments, si on peut appeler ça ainsi, se résumaient essentiellement à des tentes et de cabanes faites de bric et de broc. Aaron n'émettait ps le moindre jugement sur tout ça. C'était devenu tellement habituel pour lui tout ça. Et puis, il faut dire que sa cabane est sans doute l'une des plus craignos du quartier ouest. Il avait pu s'y installer par ce qu'elle étaient mauvais état et que personne n'avait envie de perdre son temps à essayer de la retaper. Et très franchement, lui non plus n'avait pas de temps à perdre pour ça. L'immunisé traversait les rues de la zone ouest sans se soucier de ce qui l'entourait. Il regardait droit devant lui. On aurait presque dit qu'il ne regardait pas vraiment et plutôt qu'il était dans la lune. Les rares personnes qui passaient devant lui avaient tendance à s'écarter à cause de sa stature ou sinon par ce qu'ils avaient identifiés à qui ils avaient à faire et préféraient éviter tout contact avec lui. Il faut dire qu'on n'est plus très nombreux à Hope City, ou du moins ce qu'il en reste depuis les événements de 2018. On peut assez clairement dire que tout le monde connaît tout le monde.

Aaron portait sur son dos tout un bardas de choses diverses. Des fragments de meubles, une bâche et un sac plein de diverses pièces mécaniques. Le tout devait facilement peser plus de cinquante kilo qu'il portait sur ses épaules athlétiques. Il fit par s'arrêter de marcher pour se figer à l'entrée d'une cabane qui était autrement mieux foutu que la sienne. Il resta de longues secondes devant à regarder la porte avant de se sortir une clope ainsi qu'une allumette qu'il craqua pour s'allumer sa vieille clope qui manqua de s'éteindre à cause de l'humidité que le tabac avait pris. C'était dégueulasse et ça défonçait les poumons cependant, ça lui arracha tout de même un léger sourire qui disparut assez vite quand il reposa les yeux sur la porte de la cabane.

- Fait chier !

Le juron sortit de la bouche de l'homme comme quelque chose qui lui arrachait vraiment la gueule, presque comme un sifflement entre ses dents serrées par sa mâchoire crispée. Il frappa alors du poing sur la porte en affichant un air renfrogné, s'annonçant de sa voix grave.

- C'est moi... Ouvre moi !

La porte n'était pas fermée à clé mais disons que c'est par correction qu'il ne s'invitait pas dans cette cabane qu'il ne considérait plus être la sienne bien que ce fut le cas durant de nombreuses années. Une femme vint lui ouvrir. C'était sa mère qui ne le regarda même pas, ne lui parla même pas. Elle lui tourna le dos à peine eut-elle ouvert la porte. Aaron souffla la fumée de sa clope sur le dos de sa mère alors qu'elle s'éloignait tout en affichant un très léger sourire narquois comme si le fait de savoir que sa présence incommodait sa mère lui procurait du plaisir.

- Ouais... Bonjour à toi aussi Susane ! Pfffff

L'ancien rugbyman sans plus de cérémonie et tout en fumant sa clope. Il traversa l'une des pièces de la cabane qui était au final assez spécieuse, faite pour accueillir toute une famille, dans la seconde pièce se trouvait son frère qui était déjà en train de travailler sur des réparations. Aaron lui balança tout son barda sous le nez, lui posant des fragments de bois, un peu de taule et un sac rempli de divers objets mécaniques, de petits moteurs de frigo, de perceuses etc qui avaient été arrachés. Sans la moindre politesse, ce qui caractérisait bien Aaron, il regarda de haut son petit frère et lui tint à peu près ce langage.

- Tu peux faire quelque chose de tout ça ?!

La question avait presque plutôt valeur d'ordre. Il lui intimait l'ordre d'estimer tout ce merdier et de, s'il le pouvait, tenter de bricoler quelque chose pour essayer de faire monter la valeur de ces matériaux qui étaient, en l'état pas mal trop brutes. Il ne l'avouera jamais mais il sait que son frère est plutôt doué pour les réparations contrairement à lui qui n'a clairement que son physique et le fait d'être immunisé pour lui. Il ne lui proposait pas quoi que ce soit en retour. Il toisait son petit frère, clope presque terminée au bec attendant sa réponse.

Et voilà pourquoi il daigne à peine regarder son frère dans les yeux quand il vient le voir. C'est pour ça qu'il tente très peu de le rencontrer et, quand il le fait, il le fait vraiment pour la forme, se sentant encore un peu obligé par ses devoirs fraternels, se sentant investi d'un rôle de chef de famille que lui avait transmis son père à sa disparition. La raison de ce détachement est simple. Il déteste tout ce que lui renvoie David. Dès qu'il  le voit, tout ce qu'il y découvre, c'est de l'amour béat. Une forme d'amour et d'admiration assez similaire à celle qu'un chien peut éprouver pour son maître. Dès que David voit Aaron, il y a son regard qui s'illumine, qui s'éclaire, qui pétille d'une sorte de petite flamme d'admiration. David trouve ça pitoyable... réellement ! Pour lui, son frère se rabaissait devant lui. Il se comportait comme une petite créature soumise, comme toujours. SI lui est le dominant, David est clairement le dominé et se complaît dans ce rôle. Et ça, ça inspire tout sauf le respect de Aaron. C’est simple, Aaron est le prototype du mâle alpha. Il ne respecte que ce qui est soit plus fort, soit plus performant, soit ce qui parle plus fort que lui. Un jour peut-être Aaron respectera David. Un jour... Ce jour-là, ce sera le jour où David sera enfin un homme et qu'il décidera de prendre sur lui, de se faire pousser une paire de couille et qu'il tentera d'envoyer chier son frère. Ouais... on est pas rendu ! Et puis si vous voulez mon avis au passage... Aaron, c'est vraiment qu'un sale connard de macho !

Mais passons. Si on connaissait vraiment Aaron, on pouvait voir que rien que le fait de se trouver en ces lieux le rendait mal à l'aise. Et pour cause... Après qu'il ai posé toute sa merde sur le bureau de son frère Aaron s'était mis à toiser une sorte de petit autel que leur mère avait installé dans la pièce. Un autel fait avec de vieilles photos de son père et de leur sœur, tous les deux morts. Pour l'un comme pour l'autre, Aaron ressentait une grande culpabilité dans ce qui avait causé leur mort. Rien que voir ça, ça lui rappelait de sales trucs qui ne le mettait pas bien. Et les regards mauvais de sa mère adoptive n'aidaient pas du tout. En fait, ça l'impactait beaucoup plus qu'il ne le faisait croire. En fait, il était même en train de phaser complètement sur  cet autel, alors qu'il s'était assis en tailleur, finissant sa clope jusqu'à la toute dernière bouffée, ne laissant qu'un mégot qu'il gardera certainement au bec pour plusieurs jours pour compenser l'absence de tabac. Voir cet autel de fortune en la mémoire des membres perdus de la famille, ça ne lui évoquait absolument rien de positif. Et même au delà de ça, tout sans cette cabane lui évoquait sa sœur et son père. Il était perdu dans ses pensées quand son frère lui demanda comment ça allait. Aaron ne réagit pas vraiment, enfin pas immédiatement. Il te tourna vaguement vers David qui jetait un œil à ce qu'il lui avait apporté avec zèle et à qui il avait vite tourné le dos en arrivant histoire de ne pas avoir à trop regarder ce petit être qu'il méprise tant.

- Hmmm ?! Ça va ouais.

Il lui répondit le plus négligemment et le plus évasivement possible. Notez aussi qu'il lui demandait pas en retour si ça allait. Quel ours ce type ! L'intervention de son frère avait au moins eu l'avantage de le faire sortir de ses pensées. Il posa ses yeux vers la porte d'entrée de la pièce et constata que sa mère semblait comme rôder dans la maison tout en l'observant. Aaron se disait qu'elle agissait comme un animal en cage et aussi ps mal comme une mère anxieuse de voir une menace rôder autour de son enfant. Quelle pauvre cinglée ! Pourquoi c'est elle et non leur père qui avait survécu ? La réponse est simple selon notre ex-rugbyman. Par ce que c'est lui qui a toujours pris les risques pour sa famille, pris les décisions, fait les choses là où elle n'avait fait que suivre. Oui, Aaron n'a qu'assez peu de respect pour cette femme qui ne l'a jamais vraiment aimé. Au final, il finit par tourner son regard à nouveau vers David qui était au final la chose la moins désagréable de cette maison. Certes Aaron le méprise mais au moins, c'est un bon p'tit chiot qui a bien appris à faire la fête à son maître. Certes, ça pousse pas Aaron à le respecter mais c'est pas plus désagréable au demeurant que les regards à moitiés emplis de haine de leur mère adoptive qui ne lui avait pardonné ni la mort de sa fille, ni celle de son maris. Et c'est bien la seule chose qu'ils ont en commun par ce que Aaron non plus ne se le pardonne pas. Enfin bref, il regarda son frère en plein ouvrage avant de finir par lui lâcher quelque chose qui brisa un silence quand même pas mal malaisant.

- Dès que t'auras terminé... On ira au marché pour vendre tout ça.

Encore une fois, ça avait valeur d'ordre et non de question. Ce n'était pas du tout dans l'habitude de Aaron de proposer ça. Ce n’est pas la première fois qu'il vient pour se servir de son frère comme expert ou réparateur de ce qu'il avait récupéré hors des murs mais c’est bien la première fois qu'il lui proposait devenir avec lui pour refourguer tout ça. Habituellement, il se casse après que David lui ai désigné ce qui a selon lui le plus de valeur. Mais quelle est la raison de ce comportement ? Est-ce... de l'amour fraternel ?!

La réaction de David à la proposition de son frère fut plutôt habituelle et ne souleva pas grand-chose d’autre chez Aaron que des yeux qui montèrent un peu au ciel en signe d’exaspération face à l’attitude de son frère qui était encore une fois ni plus ni moins que celle d’un gentil petit toutou qui après avoir fait la fête à son maître décide de remuer la queue et de bien sautiller dans tous les sens quand ce dernier lui annonce qu’ils vont aller faire une promenade. Mais bon, ne nous étendons pas plus sur le cas de David et toute la pitié qu’il inspire à son aîné. Je dis la pitié, entendez plutôt une certaine forme de dégoût en réalité. Mais bon, ce serait mentir que de dire que l’enthousiasme désespérant de David ne le rend pas plus efficace. C’est en deux trois mouvements que ce dernier eut terminé son ouvrage, qu’il sauta sur ses pieds pour se préparer à partir en laissant à Aaron le soin de porter tout le matériel qu’il avait amené. Rien de surprenant à cela. De toute façon, notre ancien rugbyman n’avait pas la moindre intention de lui confier cette charge. C’est avec un sourire béat et un ton exaspérant de joie que le jeune Lloyd annonça à sa mère qu’il partait tandis que le spectre de passage Aaron pour sa part s’en alla dans laisser un mot, un geste, un regard à sa mère qu’il savait ne pas être sa génitrice, ce que David ignorait très certainement.

Mégot de clope au bec, que le colosse avança dans les rues du district 1 en direction du marché, emboîtant le pas à David et marchant à une cadence assez rapide, d’autant qu’il avait de grandes jambes. David peinait certainement à le suivre en marchant à un rythme normal mais l’aîné n’avait pas le moindre intention de faire ne serait-ce qu’une once du début d’un effort pour son petit frère. Dans la rue, ils croisèrent des gens qui saluèrent David mais jetèrent des regards assez froids à Aaron. Eh oui, on obtient ce qu’on mérite. À être un gros con aussi sympathique qu’une porte d e prison, on obtient qu’on est mal considéré. Le plus jeune frère Lloyd au contraire a une personnalité solaire qui attire la sympathie des gens. Aaron interprète ça comme de la pitié qu’ils ont pour lui, pour cette pauvre petite chose qu’il est. Mais en fait, les gens vivant dans le coin, pour certains depuis des années, ils connaissaient la relation entre les deux frères et tout le monde sait ici qu’il a tué sa propre petite sœur sans la moindre hésitation avant même qu’elle ne se transforme. Il coure même quelques rumeurs selon lesquelles il serait un tueur de sang froid et que c’est lui qui se serait débarrassé de son père lors de leur expédition où Aaron est revenu seul. Mais ça Aaron s’en moquait. Ce serait donner beaucoup trop d’importance à tout ça que d’y accorder de l’intérêt. Dans les faits ça n,’aidait pas du tout les racontars à se dissiper. Et en règle général, les gens du « quartier » où ils habitaient connaissaient David très bien, l’adoraient tous et connaissaient aussi très bien Aaron et savaient la façon dont il le traite depuis toujours et n’ont jamais apprécié la froideur et la violence apparente de l’aîné sur son cadet. Que voulez-vous ! On n’empêchera jamais personne de juger son prochain ! C’est peine perdue.

Mis à part ça… eh bien Aaron comme toujours resta soit concentré sur son objectif, se diriger vers le marché, soit regardait dans le vague en pensant à dieu sait quoi. Certains pourraient trouver que cet air pensif de brun ténébreux lui donne un certain charme… parfois ça fonctionne auprès de ces dames. Mais honnêtement elles sont rares celles qui se laissent berner par ça… rares et/ou très jeunes. A chaque fois que son frère tentait en vain d’engager une conversation, soit Aaron l’ignorait, soit il lui répondait vaguement d’un « hmm » duquel on ne saurait déterminer s’il était affirmatif ou négatif. On y décelait juste une vague exaspération et encore, pas tant que ça, plus de l’ennuie en fait.

Et… bah c’est tout ce qu’il y a de notable sur le trajet… Ouais, comme il peut m’arriver de le dire assez souvent, la vie de Aaron est tout sauf amusante. Il ne prend qu’assez peu de plaisir à quoi que ce soit. Il va d’un point A à un point B sans se soucier du trajet. Ce qui importe c’est la destination, la survie… et encore est-ce qu’il vit réellement ? On se le demanderait presque. Il agit presque comme un automate dépourvu d’émotions. Du moins, c’est ce qui peut paraître de l’extérieur mais David pour pour sa part, qui connaît certainement mieux son aîné qu’il ne le laisse entendre, doit percevoir qu’il n’en est rien en réalité et que Aaron, comme leur père est plutôt un bouillonnement d’émotions torturées mais refoulées.

Après, moi je dis ça pour Aaron, personne veut lui parler mais David fera-t-il une rencontre inattendue et intéressante ?! Vous le saurez dans son prochain poste ! A moins qu’il en ai marre de m’attendre ce qui est fort probable !