I believe the world is burning to the ground Δ Noah

Le paysage défilait vite. Trop vite. De toute manière, à quoi bon s'attarder dessus ? Tout ce qu'il verrait serait des maisons abandonnées, vidée de toute vie. Ou bien croiserait-il le regard stérile des marcheurs, corps qui avaient été autrefois humain; qui n'étaient plus que des cadavres ambulants décharnés, sans autre but que de bouffer les derniers survivants. Le regard bien droit devant lui, il filait sur sa moto. Son objectif ? Hope City. Pff. Quel nom stupide. Comme si dans ce monde détraqué il pouvait encore y avoir une lueur d'espoir. L'humanité était condamnée à y passer. Lentement mais sûrement. Tout ce qu'il fallait faire maintenant, c'était survivre. Se battre pour mourir le moins vite possible. Et pour l'instant, ça signifiait trouver cette foutue ville.
Peut-être la dernière ville a être encore debout.

Il allait enfin se poser quelque part. Peut-être. Depuis des années maintenant, il ne cessait de se déplacer de villes en villes. Enfin, plutôt de campements en campements quand il en trouvait; c'est-à-dire pas beaucoup. Néanmoins, il ne restait jamais assez bien longtemps. Soit pour sauver sa peau, abandonnant les autres à leur triste sort (ce qui n'était jamais simple, la culpabilité était parfois pesante), soit parce qu'il n'aimait tout simplement pas les groupes sur lesquels il tombait.  

Avec lui, où qu'il aille, à l'abri dans son vieux sac, il trimbalait des souvenirs. Petits objets de sa vie passé, auxquels il s'accrochait un peu trop.

un chouchou rose fuchsia – Il appartenait à sa mère, qu'il -comme le reste de sa famille- adorait. D'une douceur et gentillesse sans pareille, à ses yeux elle était extraordinaire. À l'époque Noah pensait que sa famille serait toujours là, que ses parents resteraient toujours ensembles, qu'ils vieilliraient ensemble. Malheureusement, à l'aube des seize ans du jeune, elle succomba dans un accident de voiture. Carambolage violent qui les avaient tous dévastés.

une vieille photo – Elle datait d'au moins douze ans. Rangée dans son portefeuille à présent vide (l'argent ne valant plus rien), elle avait été prise deux-trois jour avant l'apocalypse. Dessus, les visages étaient souriants, heureux. Visages qu'il ne verra pas avant un long moment. Jusqu'à ce qu'il décide que survivre ne vaut plus la peine.

L'image représentait sa famille. Son père, Phoebbe et son meilleur ami, Kell Rivers. Ces deux-là s'étaient connus en primaire, alors que les Monty quittaient le pays du vin et des jambes de grenouille pour s'installer à Salem, ville natale de sa mère. La raison de ce départ ? Elle voulait retrouver les terres de son enfance et être proche de ses parents qui vivaient en campagne, à quelques kilomètres de là.

Depuis leur rencontre, ils ne s'étaient pas lâchés, faisant leur scolarité et traînant ensemble quand ils le pouvait. Leur endroit préféré ? Le garage de Noah. Son père, mécanicien, leur apprenait deux-trois trucs.

sa moto - Enfin techniquement, celle de son père. Il l'a empruntée pour fuir Salem avec sa sœur. Son géniteur, après l'apparition des zombies, il ne l'a pas revu. Au moment de partir, avec Phoebbe, il l'ont attendu dans leur salon. Une heure. Deux heures. Toute la nuit. Au petit matin, le coeur brisé de partir sans leur paternel, ils prirent la route. Depuis des années, Noah s'est fait à l'idée qu'il était mort. Comme Kell. Le jeune homme ne doute pas de leur capacité à survivre, mais il ne veut pas espérer en vain.

le journal de Phoebbe – Ce journal contenait tout. Tout ce qu'il s'était passé depuis la disparition de leur mère. Tout jusqu'à sa propre mort. Comment ils avaient réussit tant bien que mal à rejoindre leur grands-parents et s'étaient fait trahir quelques temps plus tard par un groupe de gens qu'ils avaient aidés. Comment, à la suite de ça, ces même gens ont pris le contrôle totale de la maison et leur habitants. Comment des marcheurs se sont infiltrés par le garage mal fermé une nuit et les ont dévorés.  
Comment Phoebbe se sentait après avoir été mordue.

Inconsciemment, il accéléra en pensant à cette fameuse nuit. Il n'avait pas été capable de protéger une des seules personnes qui comptait pour lui. Pire, il avait été obligé de la tuer de ses propres mains; ce souvenir le hantant encore. En fin de compte, il n'avait pu sauver personne, et ça le rendait fou. Il avait été séparé de chaque être qu'il avait aimé. Que ce soit par les zombies ou pire, ses propres congénères.  

Et puis, parmi tous les souvenirs, il y avait aussi une boucle d'oreille, soigneusement rangée avec la petite photo. Appartenant à Alice. Son Alice. Durant un temps, ils avaient été ensemble. Avec elle, il avait passé les meilleures années de sa vie. Elle l'avait sauvée de son noir état d'esprit à la mort de sa soeur; il s'y était attaché. Mais bon. Comme il s'y attendait, ces moments ne durent jamais longtemps. Par hasard, il recroisa un jour les meurtriers de Phoebbe. Ceux qui les avaient trahis et pris en otage leur grands-parents. À ce moment, lui voulu la vengeance. Elle ne le suivi pas et l'abandonna à son projet. Seul. Oh, ce qu'il lui en voulu.

Cependant, elle avait eu raison sur bien des points. Déjà, que c'était dangereux: malgré son plan, qui avait réussi, il avait passé un sale quart d'heure, les cicatrices gravées sur sa peau en témoignaient. Ensuite, que la vengeance ne servait à rien. À part engendrer plus de tension et de morts, elle ne servait à rien. Ça ne ferait pas revenir les disparus.
Même si elle avait raison, il s'en foutait.

C'est là qu'il la vit. Remparts dressés, Hope City se dressait avec fierté au milieu de nul part.