everything changes, nothing perishes「saskya」

☣ Date d'inscription : 31/10/2019

Place du Marché — FT. Saskya Wynisen

Kashim n'a jamais réellement porté la Place du Marché dans son cœur.

Trop de cris, des vols à outrance et surtout, beaucoup trop de contacts avec les autres, ce qui ne manquait pas d'arracher un claquement de langue irritée au jeune homme. Même s'il ne s'agissait que d'un bousculement innocent, sans volonté de l'importuner, il supportait mal cette proximité. Non en fait, il n'aimait tout simplement pas être en présence d'une foule aussi dense.

Malheureusement, son occupation actuelle rendait la visite de la Place obligatoire et régulière. Beaucoup trop régulière à son goût. S'il lui suffisait d'échanger de quoi se nourrir, Kashim ne viendrait pas aussi souvent. Mais, en tant qu'explorateur, ce lieu était un incontournable.

C'était dans ces moments-là qu'il regrettait le choix de cette vocation.

Mais quel autre choix avait-il de toute manière ? Sa taille et sa force étaient ses principaux avantages, il n'était pas assez compétent pour devenir un chercheur ou tout autre activité intellectuelle. Alors, malgré les inconvénients, le métier d'explorateur était probablement celui qui lui convenait le mieux. Et puis comme ça, il se rendait utile au moins. Parce qu'à chaque fois qu'il passait les barricades pour s'aventurer dans ces zones hostiles, c'était pour les autres, pas pour lui.

Mais aujourd'hui, pas de prises de risques. Il se contente de errer sur la Place, jetant des coups d’œils brefs sur des articles parvenant à susciter sa curiosité. Il s'attarde un peu sur une arme potentielle, mais décide de ne pas donner suite, détourne le regard et s'apprête à repartir.

Cette fois, ce n'est pas un objet qui attire son attention, mais une personne. Une femme. Face à lui, elle avançait, allait sans doute passer à côté de lui sans lui accorder le moindre regard, mais Kashim lui, croit la reconnaître, croit savoir de qui il s'agit et...

« Sisi..? » Ce n'est qu'un murmure, mais il sent sa voix qui se brise lorsqu'il mentionne ce surnom du passé qu'il aurait pourtant préféré oublier. Était-ce une hallucination ? Un mirage issu de ce désir de revoir cette personne qu'il n'a jamais réellement cessé d'aimer ?

Et si c'était réel ? Si c'était réel, tu n'aurais pas le droit de l'appeler ainsi. Si c'était réel, tu n'avais de toute façon plus ta place dans sa vie. Et pourtant, malgré ses propres réflexions, Kashim ne put résister. Et cette fois, après une profonde inspiration, il dit, plus fort, la voix remplie d'espoir :

« Saskya..? Saskya c'est toi ? »

☣ Date d'inscription : 28/10/2019

Il avait bien fallu que tu y retournes. La dernière fois que tu avais fait un tour dans le désert, tu n’avais pas eu l’occasion de ramener grand-chose. Pour couronner le tout, tu ne t’étais pas raté, tu étais revenue en ville en te vidant de ton sang et si, du fait de ton immunité, tu ne ressentais pas la douleur, tu étais parfaitement consciente que si tu en faisais trop, tu finirais par rompre les points de suture qui empêchaient la plaie de ton abdomen de s’ouvrir à nouveau. Evidemment … tu n’en faisais qu’à ta tête, et si tu avais pourtant assuré que tu ferais attention, tu étais retournée dehors pour ramener de quoi manger. Parce que ça aussi, c’était vital.

Lorsque tu passais par la place du marché, tu faisais vite. Tu avais pris des habitudes, ici, toujours les mêmes marchands, tu savais ce qu’ils voulaient, tu t’arrangeais pour le leur trouver, ainsi, tu ne perdais pas de temps en discussions ou en négociations, tout ce que tu ne supportais pas, en somme. La foule qui circulait ici, de façon quotidienne, avait en plus cette faculté à te filer la nausée, tu ne parvenais même pas à éviter les bousculades et l’atmosphère de l’endroit avait toujours tôt fait de venir à bout de ta toute petite dose de patience.

C’est pour cette raison, Saskya, que tu traces ton chemin, le plus rapidement possible, et une fois ton sac assez plein, tu files droit pour quitter la place, pour t’extirper des griffes de cet amas d’êtres humains. Les yeux fixés droit devant toi, tu restes impassible, et si tu reconnais effectivement le visage de l’homme que tu t’apprêtes à croiser, tu fais comme si ce n’était pas le cas, comme s’il n’était qu’un inconnu au milieu de ce tumulte. Après tout, vu votre passé commun, et le discours que tu avais pu tenir lors de votre lointaine dernière rencontre, tu te dis, un peu naïvement peut-être, que c’est un peu comme s’il l’était vraiment, inconnu.

Et pourtant. Alors que tu le croises, et malgré l’agitation autour de vous, tu l’entends, ce murmure, il résonne comme si, au moment où ton épaule frôle la sienne, vous veniez de vous laisser enfermer dans une bulle. Et ce surnom n’éveille pas que des bons souvenirs, non. Il est amer. Il est acide, même. Si aigre, que tu choisis de l’ignorer, lui aussi. Avant de finir par t’arrêter, tout de même, lorsque ton prénom résonne derrière toi.

▬ C’est moi. Lâches-tu avant de consentir à tourner la tête vers lui, à ancrer tes yeux dans les siens. Ça faisait longtemps, Kash.

Et tu es troublée, sciée en deux par le malaise qui a prit place au creux de ton estomac, et un espèce de soulagement, celui de constater qu’après toutes ces années, il était encore en vie, qu’il subsistait encore, ce morceau de ton passé.

☣ Date d'inscription : 31/10/2019

everything changes, nothing perishes

Place du Marché — FT. Saskya Wynisen

Au départ, il a cru qu'elle partirait, ignorerait son appel désespéré et tracerait sa route en lui faisant comprendre qu'elle n'avait aucune intention de lui adresser la parole, même après tant d'années. Que la séparation d'antan était un adieu définitif et non pas un simple au revoir qui n'excluait pas de retrouvailles futures.

Parce que c'est ainsi qu'il l'avait ressenti, à l'époque. Lorsqu'elle avait tourné son dos à lui, à eux, il avait eu l'angoissante impression que jamais plus il ne reverrait la Saskya qui avait pris soin d'eux, celle qui leur avait permis de survire dans ce monde hostile alors qu'ils n'avaient personne d'autre.

Et peut-être que son intuition avait été la bonne. Peut-être, non, sans doute n'était-elle plus la même qu'avant. Sans doute avait-elle changé. Alors, la sensation qu'il ressentit lors de leur séparation ne serait pas infondée. Pourtant, lorsqu'elle prononça ce si vieux surnom, ce surnom de son enfance, Kashim eut presque l'impression de retomber dans le passé, retourner au moment où il pouvait encore prétendre être un ami sans ressentir la moindre honte.

Ça aurait dû être agréable oui, le faire sourire sans doute. Pourtant, il pince ses lèvres et serre les poings, expire doucement en chassant de son mieux une grimace qui menaçait de s'installer sur son visage. Ah, peut-être que ce surnom ne lui plaisait plus vraiment, finalement.

« Oui, ça faisait longtemps. »

Il n'ose pas dire « trop » longtemps, parce qu'il imaginait que, contrairement à lui, elle n'avait probablement jamais ressenti un quelconque désir de le revoir. Il pensait que ce serait déplacé.

Et cette situation le mettait mal à l'aise. N'était-il pourtant pas celui ayant abordé la jeune femme ? Celui qui avait de l'interpeller malgré le fait que cette dernière allait tracer son chemin sans plus se soucier de lui. C'était sa faute alors pourquoi se sentait-il aussi nerveux ? Il maintient son regard fixé dans celui de Saskya malgré la terrible enfin de détourner le regard et fuir loin d'ici. Il monte la fermeture éclaire de sa veste jusqu'au bout et contemple un instant l'idée d'y dissimuler son visage comme un gamin timide.

Mais non, il ne pouvait pas. Il devait prendre son courage à deux mains. Parler avant qu'elle ne s'en aille.

« Comment tu tiens le coup ? »

Il ne lui demande pas « tu vas bien » parce qu'il connaissait probablement la réponse. Parce qu'il avait l'impression que quelque chose s'était brisée en elle comme chez lui et que jamais ils ne pourront se sentir épanoui.

Et c'était entièrement de sa faute.

« Tu as vraiment changé... »

C'était plus une constatation à voix haute qu'autre chose. Il ne s'attendait pas vraiment à ce qu'elle y réponde. Il ne pensait pas non plus être encore capable d'afficher un tel sourire, marqué par la mélancolie. Mais, il disparait bien vite alors qu'il fronce légèrement ses sourcils et passe inconsciemment une main dans sa nuque.

« Où est-ce que tu étais pendant toutes ces années ? »

☣ Date d'inscription : 28/10/2019

Longtemps, oui. De très longues années, à dire vrai. Et ces années, c’est toi qui les as imposées, lorsque tout ça est arrivé, tu t’es contentée de ramener deux gamins sur quatre en vie à Hope City et puis, tu leur a tourné le dos, probablement en te disant que ça valait mieux pour eux comme pour toi. Si tu leur en voulais ? Tu n’aurais su le dire. De l’eau avait couler sous les ponts, et puis, aujourd’hui, tu savais que Kanaan était parvenu à survivre. Alors évidemment, ça n’effaçait rien de leur bêtise. Pourtant, c’est vrai, aujourd’hui, tu as l’impression d’avoir un poids en moins sur le cœur, probablement pour ça que tu t’es arrêtée, que tu t’es retournée, et que tu lui as même adresser la parole.

Et ce n’est probablement pas la première fois que tu croises Kashim, de loin. Mais tu sais quoi ? Ton esprit, jusqu’à aujourd’hui, était parvenu à le faire passer pour un inconnu, comme si tu avais réussi à l’occulter de ta mémoire, d’une manière ou d’une autre. Et tu ne sais pas vraiment quoi dire, après tout ce temps. C’est difficile, de trouver autre chose que des banalités, alors, tu piétines, tu fais du sur place, signe que tu n’es pas particulièrement à ton aise. Pourtant, aujourd’hui, étrangement, tu te refuses de fuir. A croire que tu avais décider d’affronter les choses …

▬ Je suis en vie, et je tiens sur mes deux jambes. C’est ta façon à toi de dire que ça va, plus ou moins, évidemment.

Et puis, tu te retournes, complètement. Tu lui fais face pour de bon, avant de détourner les yeux, tu fais mine d’observer les étals autour de vous, de balader ton regard sur des marchandises qui ne t’intéressent pas, et puis, après quelques secondes comme ça, tu soupires. Et lorsque ton regard revient à lui, tu le détailles, des pieds à la tête. La dernière que tu l’avais vu, ce n’était qu’un gamin, un peu plus vieux que toi. Et aujourd’hui, tout comme Kanaan, il était devenu un homme. Plus grand que toi, plus massif que toi. Son regard n’était plus le même. Sa voix s’était faite bien plus grave.

▬ Tout comme toi …

Le sourire que tu captes, furtivement sur son visage à le don de te surprendre. Et tu te pinces les lèvres, un instant, réajustant ton sac sur ton épaule, tu t’affaisses légèrement.

▬ Ici. Surprenant, n’est-ce pas ? Tous au même endroit. Et pourtant pas fichus de se mettre le grappin dessus avant aujourd’hui. Certains diraient que c’était tout bonnement impossible, toi, tu crois savoir que c’est plutôt naturel, en réalité. Que vous n’avez probablement fait que vous évitez, inconsciemment, sans doute. Peut-être qu’avant aujourd’hui, vous étiez tout simplement incapables de vous faire face. Je suis entrée dans la milice.

Et voilà. C’est ce que tu te dis. Tu n’as fait que répondre à ses questions et remarques et maintenant, tu te trouves dans l’incapacité presque totale de relancer la conversation. Tu songes même déjà à lui souhaiter bonne journée – ce serait ridicule, tu en conviens – et à fuir, à nouveau. Sauf qu’alors que tu t’apprêtes à lui tourner le dos, à t’éloigner … quelque chose te reviens en tête, et tu relèves le nez. Subitement sérieuse.

▬ Kanaan est en vie. Tu lâches une bombe, tu devrais le savoir, pourtant, tu le fais sur un ton extrêmement neutre. Peut-être parce que ça y est, tu t’es faite à l’idée. Peut-être aussi parce que ça te ressemble, tout simplement. Si tu le croises … fais attention à toi.

Après tout, tu l’avais parfaitement entendu te dire qu’il chercherait à se venger. Et tu étais toujours bien décidé à l’en empêcher.

☣ Date d'inscription : 31/10/2019

everything changes, nothing perishes

Place du Marché — FT. Saskya Wynisen

Apparemment, ils n'étaient plus capables d'entretenir un échange de manière naturelle. Elle n'était pas à l'aise, il n'était pas à l'aise, personne ne l'était. Les regards se croisent puis se fuient aussitôt après et Kashim se dit qu'elle préférerait être ailleurs, n'importe où tant qu'elle n'avait pas à être en sa présence plus longtemps.

Alors que lui désirait faire durer cet instant un peu plus, même s'il ne trouvait que de simples banalités pour alimenter leur conversation. Tant d'années à cultiver une haine de soi et une cinglante culpabilité sans jamais pouvoir même tenter de sa racheter... Pouvait-on réellement lui en vouloir s'il éprouvait le soudain désir de renouer des liens ?

Peut-être était-ce égoïste de sa part, il ne le niera pas. Il aurait pu partir à sa recherche de lui-même, chose qu'il n'avait pourtant jamais fait jusqu'à maintenant. À cause de la honte bien sûr, l'impression de ne pas être digne, mais une pointe de peur également car il n'oubliait pas non plus la punition qu'elle leur avait infligé.

« La milice hein ? Ça te correspond bien. Je pense. »

Mais il pense mal sans doute, parce qu'il se base sur la Saskya qu'il a connu à l'époque, celle qui ne mettrait pas des enfants en danger pour sa vengeance. Celle qui n'avait pas perdu Kanaan. Et peut-être que pendant toute son enfance, il l'avait trop idéalisé, trop attendu d'elle, trop dépendu d'elle. Et le poids qu'elle fut contrainte de porter n'aurait jamais dû se retrouver sur les épaules de l'enfant qu'elle était.

Il s'apprête à lui révéler qu'il avait choisi de devenir explorateur, mais alors qu'il entrouvre ses lèvres pour lui donner cette information probablement inutile, aucun son ne sort. Car Kashim voit dans ses gestes qu'elle ne compte pas rester plus longtemps, que leur rencontre allait bientôt prendre fin.
Alors lorsqu'elle prononce ces mots, ce nom, il oublie un instant la tristesse qui menaçait de le consumer en sachant que leur échange se terminerait aussi vite qu'il n'avait commencé, et se fige.

Paupières qui s'ouvrent progressivement, le souffle qui se coupe subitement et le choc qui s'installe sur son visage. Réalité ou fruit de son imagination ?

« Quoi...? »

Kanaan est en vie. Kanaan est en vie. Kanaan est en vie. Cette phrase se répète dans son esprit comme un mantra, comme cette vérité risquait de disparaître s'il arrêtait d'y penser.
Il ose s'approcher, attrape fébrilement le bras de Saskya et plonge son regard dans le sien, à la recherche de la moindre réaction trahissant un mensonge de sa part. Mais cette action est ridicule, tellement ridicule parce qu'après tout, pourquoi mentirait-il sur une chose pareille ?

« Kanaan est en vie..? Sa voix est tremblante et l'étreinte sur le poignet de la jeune femme se resserre. Où est-il ? Pourquoi je devrais faire attention ? Comment...? »

Trop de questions, trop d'émotions qui se bousculent. Il sent son cœur battre furieusement furieusement dans sa poitrine alors qu'il est submergé par la confusion et un soulagement certain. Il croit sentir des larmes couler sur ses joues alors qu'il peine encore à réellement intégrer l'information.

☣ Date d'inscription : 28/10/2019

Ce n’est qu’un échange banal, en apparence. C’est vrai, n’importe qui passerait proche de vous deux penserait à une discussion courte, presque un peu trop formelle pour l’époque, mais, on n’imagine pas, du moins, tu ne le penses pas, la tempête qui fait rage à l’intérieur de toi. Ces derniers temps, c’est ton passé au grand complet qui te reviens dans la face, et oui, c’est douloureux, c’est la seule chose qui parvient encore à te faire du mal, en vérité.

Alors oui, Saskya, bien vite, tu ressens l’envie, le besoin même, de fuir Kashim. L’ignorance dans laquelle vous vous êtes tous les deux installées est bien plus simple à gérer parce qu’elle est complètement habituelle. Tu aimerais rentrer. Retourner à ta vie, tandis qu’il retourne à la sienne, mais tomber sur lui, ici, aujourd’hui, n’est peut-être pas le fruit du hasard … surtout si peu de temps après le retour de Kanaan dans ta vie. A croire que le monde s’est donné le mot, et toi, tu as toujours fait en sorte de t’adapter au monde. Du coup, alors que tu aurais pu simplement lui tourner le dos en lui souhaitant bonne journée, comme tu l’aurais fait poliment avec n’importe quel inconnu, tu consens à lui offrir quelques mots de plus. Un avertissement. Tu ne sais pas pour qui tu le fais, si c’est pour lui, pour toi, ou pour Kanaan que tu refuses de voir sombrer dans la vengeance … Peut-être les trois, au final. Toujours est-il qu’une fois l’information lancée, tu soupires, et puis, tu as ce mouvement, comme si tu allais partir, parce qu’encore une fois, c’est plus facile de fuir. Tu n’es même pas capable de regarder en face le résultat. De constater par toi-même ce que provoque cette nouvelle chez ton ancien ami d’enfance.

Sauf que tu n’es pas seule humaine en jeu, et si tu peux rester sans réaction, Saskya, ce n’est visiblement pas le cas de Kashim. Et le voilà qui avance, qui vient même attraper ton bras, et là, tu oses le regarder droit dans les yeux. Il sert. Il te fixe. Tu lis bien trop d’émotions dans ce regard, Saskya, tellement que ça te bouleverse. Et c’est pire, lorsque tu constates que ses yeux sont humides, et que les larmes ont fait leur apparition. Là, tu as ce geste que tu n’as plus eu pour personne depuis des années maintenant, ta main se lève doucement, et tes doigts viennent délicatement déposer une caresse sous son menton. Lorsque tu étais enfant, tu gratifiais tous les gamins de ton entourage de cette petite marque d’affection. C’était une façon pour toi de dire que tout irait bien, parce que tu étais là. Ça avait toujours bien fonctionner, et c’est probablement pour ça que ça revient, presque naturellement.

▬ Quelque part … dans le coin. Je suppose ? Tu hausses les épaules. Difficile à imaginer, n’est-ce pas ? Que tu ne sois pas littéralement collée au jeune homme maintenant que tu sais qu’il est vivant. Et pourtant. Tu as l’impression, en ce moment, que rester proche de lui pourrait devenir dangereux, alors tu t’abstiens, tu imposes un peu de distance, même si tu ne peux pas empêcher les rapprochements intempestifs.

Tu détournes un peu les yeux. Et puis, finalement, tu dégages ton bras de son emprise et c’est toi qui viens vivement te saisir du poignet de Kashim. Tu le sers entre tes doigts, le tirant en avant à ta suite tandis que tu t’éloignes et que tu sors de la foule.

▬ On va chez moi. On sera plus tranquilles.

☣ Date d'inscription : 31/10/2019

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Place du Marché — FT. Saskya Wynisen

L'idée que ce soit un mensonge lui avait brièvement traversé l'esprit, mais elle disparaît bien vite. Pourquoi est-ce qu'elle mentirait sur un sujet aussi sensible ? Surtout elle. Elle qui avait été plus proche de Kanaan que quiconque. Celle qui avait été la plus affectée par sa disparition. Mais cette pensée avait été plus forte que lui. Après toutes ces années, il commençait à se dire que l'espoir de le revoir un jour en vie n'était qu'une fantaisie.

Alors cette nouvelle le fait bel et bien pleurer. Les larmes dévalent sur ses joues alors que son regard brouillé ne quitte plus Saskya. Mais il a un léger sursaut lorsque sa main vient caresser son menton. Un geste auquel il ne s'attendait pas le moins du monde. Un geste qu'il n'avait cependant jamais oublié. Et qu'il n'aurait jamais cru recevoir à nouveau un jour. Il se surprend presque à fermer les yeux, profiter de ce contact et se remémorer les souvenirs d'un passé encore paisible. Mais il savait qu'il ne devait pas se laisser aller. Qu'il n'en avait pas le droit. Que ce n'était sans doute qu'un simple réflexe de la part de Saskya.

Il souffle doucement et tente de cacher son ébranlement, de calmer son cœur battant beaucoup trop vite à son goût. À cause de la nouvelle ou du contact avec Saskya, il ne sait pas trop et préfère ne pas y penser.

« Je vois... Kashim se demande tout de même pourquoi il ne l'avait jamais croisé s'il était dans le coin. Peut-être était-il arrivé depuis peu ? Dans tous les cas... Je suis heureux de savoir qu'il est encore en vie... »

Et il s'agissait de la pure vérité, car il avait changé, grandi et s'était rendu compte de ses erreurs. Et puis, même à l'époque de sa disparition, il n'avait jamais réellement voulu lui faire autant de mal. Il avait laissé la jalousie influencée ses actes et ces derniers ont escaladé en conséquence.

Il est surpris lorsqu'elle se dégage de son étreinte, parce qu'il se rend finalement compte qu'il l'avait attrapé sans crier gare et inconsciemment. Kashim s'apprête à bredouiller des excuses, mais est coupé court lorsqu'elle répète son geste en déclarant l'emmener chez elle.

Kashim est confus oui, mais il ne dit rien sur le moment et se contente de la suivre bien sagement. Comme il avait l'habitude de le faire à l'époque. Son regard se pose sur cette main autour de son poignet et il ne peut s'empêcher de la fixer longuement. C'était une sensation étrange qu'il avait presque totalement oublié. Mais, il devait se ressaisir. Ce n'était pas le moment de se perdre dans le passé.

« Tu es sûre ? M'inviter chez toi alors que tu n'as sans doute pas envie d'avoir plus à faire à moi que ça. »

Pourquoi le voudrait-elle après tout.

☣ Date d'inscription : 28/10/2019

Tu hoches la tête. Brièvement, en plus. Jadis, tu aurais été la plus heureuse du monde, en annonçant une telle nouvelle. Tu aurais sans doute été relativement surexcitée, souriante, bondissante, même. Parce qu’avance, Saskya, avant de devenir cette jeune femme qui avait oublié ce que c’était de rire, de sourire, tu avais été une enfant joyeuse, une petite lumière, un soleil dont les éclats atteignaient tout ceux qui avait l’opportunité de t’approcher. Et pourtant. Aujourd’hui, tu ne fais rien de plus que ça. Un simple hochement accompagné d’une expression bien trop neutre imprimée sur le visage.

Étonnement, tu ne doutes même pas de sa sincérité. Il a grandi. Tu peux le voir, et le sentir dans son regard, dans chacun de ses mots, dans sa façon d’être et d’agir. C’est étrange de penser une telle chose de Kashim, parce que tu devrais probablement le haïr – et Dieu seul savait à quel point ça avait pu être le cas, à une époque – souhaiter sa mort, sa disparition, mais à la place, tu te dis simplement qu’au final, il te ressemble plus que tu ne peux l’imaginer. C’est probablement l’une des raisons qui fait qu’au lieu de t’éloigner, de le laisser seul pour méditer sur ce que tu viens de lui dire, tu finis par le gratifier de ce geste bref avant de l’entraîner avec toi. Lorsque sa voix retentit, cependant, tu t’arrêtes. Tu te figes littéralement, les yeux grands ouverts, au beau milieu de cette rue, tu restes silencieuse un instant, comme si subitement, tu ressentais le besoin de réfléchir un instant à ce que tu étais en train de faire.

« J’en suis sûre. » Tu marmonnes plus que tu ne parles réellement. Peut-être que malgré ce que tu es en train de dire, au fond, tu doutes encore un peu, mais tu finis tout de même par te retourner pour lui faire face à nouveau, sans toutefois lâcher son poignet que tu gardes entre tes doigts. « Si je n’avais pas envie de te voir, je te laisserais ici. D’ailleurs … je ne t’aurais probablement pas adressé la parole, si c’était le cas. » Parce qu’au fond, tu étais comme ça. Tu ne faisais jamais dans la demi-mesure, si tu ne désirais pas la présence d’une personne, tu la fuyais, tu t’arrangeais pour ne jamais lui faire face, tu ne lui accordais ni tes regards, ni tes mots.

Tu souffles. Un sourire n’aurait sans doute pas été de trop, pour prouver ta sincérité, ou du moins le rassurer un peu. Mais aucun ne vient troubler la neutralité presque inquiétante de tes traits. A la place, tu te détournes, à nouveau, tu tires un coup sec sur sa main et tu reprends ta route, t’engageant dans une ruelle que tu longes un moment avant de t’arrêter. Là, seulement, tu le lâches, tu déverrouilles la porte de ton petit logement avant de t’y engouffrer en silence. Puis, après plusieurs longues secondes, ta voix résonne à nouveau. « Entre. Et referme derrière toi. » Pendant ce temps, tu craques une vieille allumette pour allumer les quelques bougies posées un peu partout pour éclairer un peu l’endroit. « J’ai pas grand-chose à t’offrir…personne ne vient jamais ici. » Tu croises les bras, tu viens prendre appui sur le vieux buffet branlant qui se trouve au fond de la pièce et puis, tu soupires très lourdement. « Kanaan a changé. » Tu détournes la tête. Comme si tu avais honte de dire une telle chose. « Il est dangereux. C’est tout ce que tu as besoin de savoir. Reste loin de lui, ça vaut mieux. » Tu sers les dents, consciente qu’en disant une telle chose à Kashim, tu le couvrais lui, privant Kanaan – ou plutôt Micah – d’une probable opportunité de se venger. Une vengeance qu’il désirait pourtant ardemment. En clair, oui, tu trahissais probablement ce garçon que tu aimais tant au profit de celui qui lui avait fait tant de mal … mais le fait est que tu ne désirais pas perdre un gamin de plus, parce que, Kashim aussi faisait partie de ton passé, un passé déjà bien assez tâché de sang. Un passé que tu voulais préserver, protéger.