unhappy pre-birthday

Qu'est ce qu'il prétextait à ses camarades de classe, à l'époque ? « J'ai pas le temps », « j'ai pas d'idée », « de toutes façons, j'ai pas d'argent ». Alors qu'en fait, il n'avait juste pas envie. Maintenant, c'était tout l'inverse.

Dans sa quête pour devenir un frère aîné digne de ce nom, Mac avait encore du chemin à faire, et l'étape qui le préoccupait actuellement était une des plus importantes. Sans doute le savait-il quand il était encore un adolescent, mais qu'il ne voyait pas encore l'intérêt d'y prêter autant d'attention. Que de toutes façons, il y avait des parents et une petite sœur pour faire le boulot à sa place. Que son frère n'avait de toutes façons qu'un an de différence avec lui, que ça ne faisait pas beaucoup. Que c'était pas la peine.

L'anniversaire de Kyuusuke était une très bonne occasion (sur une échelle de « tu n'existes pas » à « je me sacrifierais pour toi ») de montrer que le reste des Hô pouvait encore former une famille (un peu décousue, mais une famille quand même). Ils étaient en vie tous les trois, c'est que ça valait le coup d'essayer. Tant qu'ils pouvaient encore se parler, c'est que c'était possible.
C'était se contenter de peu de conditions, mais pour Makoto, voir son frère débarquer à Hope City était synonyme de résurrection. Il l'avait tout de même cru mort, entre-temps !

Aujourd'hui n'était pas encore l'anniversaire, et tant mieux pour lui. Mac ne connaissait plus (ou peut-être ne l'a-t-il jamais vraiment connu) son petit frère et ignorait totalement quoi lui offrir le moment venu. Même s'il devait de toutes évidences s'attendre à un mur, il pouvait essayer. C'est ce qu'il fait toujours, de toutes façons. Essayer jusqu'à ce que ça passe.

Il n'avait pas demandé à leur sœur de l'accompagner, ça ferait un peu trop « cran de sûreté ». Et il devait apprendre à se débrouiller tout seul. En tant que « frère aîné », tout ça. S'il n'était pas capable de cela à trente-deux ans, il n'y avait pas de temps à perdre – en particulier celui des autres.

Plus il passait près de la bicoque de Nine, plus il sentait cette proposition à l'inviter à déménager chez lui et leur sœur. C'était sans doute plus pratique de faire les choses ainsi séparément parce que Nine faisait partie de la milice, mais Mac ne pouvait s'empêcher de se demander si ce n'était pas plutôt de son devoir que de lui dire de prendre ses slips, sa brosse à dents, et venir trouver une chambre plus confortable dans la même petite maison qu'il habite. On trouverait bien de la place.

Mais fusionner deux objectifs en un, c'était se corser la tâche. Chaque chose en son temps.

Pour l'instant, Mac se contenta de frapper à la porte, incertain de savoir s'il pouvait rentrer sans attendre ou non. Il préférait mettre toutes les chances de son côté et patienter. Ainsi, il ne passera pas pour un type un peu trop intrusif (si ce n'est pas déjà le cas du point de vue opposé).
         
         

Ça faisait toujours un peu bizarre de se faire appelé « Makoto ». C'était son vrai prénom, certes, mais au quotidien, il entendait bien plus « Mac » qu'autre chose. Surtout qu'il l'aimait bien, ce surnom. Mac. Eh. Passons, c'était pas le sujet.
Il fallait vraiment mettre toute son attention et sa concentration dans cet instant précis où le petit frère ouvre la porte. Ça n'était qu'une conversation à entamer, mais pour lui, c'était une sorte d'effort olympique s'il voulait faire ça sans trop de malaise.
Manque de bol, ce malaise allait être là pendant encore un bon bout de temps.

« Qu’est-ce que tu fais là ? Natsu a eu un problème ? »

Bien sûr, évidemment, s'il y avait au moins un sujet sur lequel ils pouvaient « communiquer » sans se prendre le chou, c'était celui de leur sœur. Ils avaient la même, après tout, et y tenaient chacun comme à la prunelle de leurs yeux. Mais c'était bien la seule chose qu'ils avaient en commun. Pas que ça pour le moment, il espérait.

- Non, elle va bien.

Rajouter « c'est toi que je viens voir » aurait pu alléger ce malaise et la dureté de cette conversation, mais il était évident que Mac était là pour le voir lui. Sauf qu'il ne savait pas quels mots utiliser pour amorcer le sujet.

« Je t’écoute, qu’est-ce qu’il se passe, encore ? »

Mac ne saurait dire si le fait d'avoir fermé la porte était signe de l'acceptation d'une confrontation. Il ne savait pas trop ce qu'il y avait chez lui, il n'y avait jamais mis les pieds. Il n'avait en fait jamais osé lui demander parce qu'il imaginait parfaitement un Kyuusuke lui refuser l'accès à sa demeure. Et même si c'était là une étape peut-être primordiale dans leur rapprochement, Mac l'acceptait et respectait cette vie privée afin de ne, justement, pas perdre ses chances.

Au final, il faisait bien trop attention à ne pas le déranger pour finir par mieux le connaître. Ce qui l'amena à cette conversation un peu sortie de nulle part aujourd'hui.

- Rien, rien de particulier...

C'était à la fois idiot et vrai, comme réponse.
Évidemment qu'il ne se passait rien : Nine ne voudrait certainement pas voir son frère qu'en cas d'extrême urgence. Et pourtant, Mac ne pouvait rester là les bras croisés dans le district à se dire qu'il ne verrait son frère que lorsque la situation exige obligatoirement un contact. Il devait entretenir leur relation fraternelle, pas seulement celle qui consiste à survivre en communauté.

Sa gestuelle était un peu hasardeuse, gênée. Il ne savait quoi faire entre garder les mains dans les poches ou les faire sortir afin de montrer qu'il en avait quelque chose à faire. Mais en même temps, rester debout sans rien dans les mains pouvait montrer une image un peu plus ridicule. Il fit alors prendre l'air à ses mimines de temps en temps, sans vraiment savoir quelle serait la meilleure pose à adopter juste pour discuter dehors et debout...

- C'est bientôt ton anniversaire.

Il ne fallait pas le dire comme s'il l'en informait. Nine le savait, bien sûr.

- Je voulais savoir ce que tu avais prévu de faire.

Voilà, une méthode plus coulante, altruiste sans être intrusive ! Connaître les plans de son frère !
Si celui-ci ne prévoyait plus grand-chose avec sa famille, il devait certainement avoir un collègue ou deux avec qui il boirait une bouteille, ou bien passerait la soirée. Il y avait des fois où Mac espérait si mal connaître son frère qu'il pouvait encore découvrir de bonnes surprises derrière ses murs.